vendredi 15 janvier 2010

un deux

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L'Un est Deux

Réglons l'horloge interne à l'infini

Nous pensons trop à l'ennui des jours

Écoutons le soleil qui tape sur les secondes

Le rythme se martèle du son assoupi de la lune

Regardons les bruits, indifférents

Nos vies défilent dans l'espace

Arrêt instantané sur un son

Regroupement des voix imagées

Nos vies défilent sur des siècles

Aimons aimer

Aimer à l'éternité

Aimer l'homme dégagé du temps

Aimer les regards des instants

Les instants qui ne s'achèvent jamais

Observons la seconde éphémère dans son éternité

Préférons la nuit quand il fait jour à Minuit

Nous aimerions qu'on frappe à nos portes, pour nous annoncer

Que les montres n'ont plus d'heures

Le jour peut-il encore se lever ?

Il fait trop sombre dans les siècles

Vous n'avez rien compris

Le temps se passe sans nous

Et pourtant

Les réveils sonnent

Les matins se succèdent aux matins à n'importe quelle heure

Si on nous disait l'arrêt du temps, nous pourrions

Comprendre

Et le sang coule, imperturbable

Nos cœurs se stoppent,

Mais l'heure continue son avancée

Solitaire

Réagissons sur les minutes qui pleurent

N'attendons pas le présent qui suit

Que n'a-t-on vu le jour plus tôt !

Les pétales humains nous seraient apparus si translucides et la Terre

Si secrète en ses entrailles, on l'aurait vue en verre aux éclats de lumière

Nos rêves sont la fuite éternelle vers l'infini univers,

Nous voulons nager dans les transparences terrestres et nous survolons un monde opaque

Et les sons nous transpercent, nos lèvres se font musique et tous les bruits disparaissent

L'éventail des notes se multiplie jusqu'à devenir être

Nous sommes et nous passons à travers tous les hommes

Rêves, rêves

Perforons les chairs écarlates et crevons l'abcès de pensées confuses

Recréons le péché originel pour comprendre

Plongeons dans les tonalités du néant

Recueillons les premières larmes de sperme et sentons l'œuf éclater

Que nos rêves nous portent vers le futur !

L'avenir, suite de hasards, qui forme notre destin

Que nos rêves se fondent dans le hasard de la destinée galactique

Que nos rêves soient le fruit de ce futur

Que nos rêves soient hasards

Relions le début pour comprendre enfin

L'éternel retour

Remontons l'avenir pour penser l'origine

Délivrons-nous maintenant du futur humain qu'il y aura là-bas

La genèse est bavante de cris inentendus

Alors je repense et j'écris

Et de l'ivresse teintée

Au puissant jour,

Apparaît le faste de l'étincelle

Je n'oublierai jamais

Ce coup au cœur,

Cuivré d'ironie

Je n'oublierai jamais

Cette explosion de l'âme,

Étamée de sel

J'ai mal à l'homme,

Crevassé de ses membres

De la secte universelle.

J'ai mal au monde,

Fissuré de ses reins,

Écoulement sans faim

Et trituré dans sa chair d'encre,

Il ne peut s'amarrer,

Nul port, nul asile

Ne s'emboîtent à son rythme

Et j'ai peur de l'oubli

Du havre de son corps

Et je rêve sa vie,

En buvant son oasis,

Tout en perdant mon sang

Et je m'agrippe à sa peau,

L'espace se déchire

Et j'oublie ma peur,

J'effiloche son cœur

Pour arrêter sa course

Et mon murmure se perd,

Tout seul dans sa chair

Oublié sur le chemin,

J'étais allée trop loin

J'ai dépassé son regard,

Peut-être une lumière

Ou juste une étincelle.

Je n'oublierai jamais

Perdue comme j'étais

Au fin fond de sa vie

Et puis

Souvenir passé toujours présent

Au départ, le monde était vierge

Le principe était unique

On était l'un et l'autre

On était un et deux

Peut-être trois et quatre

On était tous les nombres

On était un et l'infini

On était le tout

Ou peut-être rien

On était le début ou la fin

On était l'univers sans limites

Divin et divine

Puis le principe s'est divisé

On est devenus un et un

Le Soleil s'est dissocié de la Lune

Et le sperme s'est mis à jaillir

Et l'ovule s'est mis en branle

La guerre des sexes commençait

Et au même moment

L'écoulement du temps

Et au même moment

Les dieux

Et au même moment

Pourquoi

Et depuis

Les principes se font guerre

Alors

J'appelle le destin. Il me répond :

« Quel est le jeu ? »

Je demande : « Quel est l'enjeu ? »

Amères sont vos lèvres, prières sont vos yeux

Des énergies conjuguées se penchent sur moi

Un cinéma de visages se déroule sous mes pupilles vagabondes

L'alarme blanche se déconnecte sous les siècles roulants

Où est-ce demain ?

Un rêve ensorcelé escalade les idées d'outre-terre

Il faut crever l'esprit du temps

Les forces initiales s'embourbent dans un fourmillement de pensées irritantes

« Mais qu'est-ce que vous dites ? »

Les destins assoiffés accourent, sens dégrisés, ivres de tenir le fil

« Réagissez ! »

« Regardez les pluies d'étoiles ! »

Souvent, une rumeur étrange semble couler du spectre infernal du son des vies

« Écoutez, le sens revient éternellement ! »

« Écoutez, les ondes crient en silence ! »

Le vacillement des pluies de l'âme emplit maintenant l'espace vaincu par les heures

« Pensez à l'inexactitude du temps ! »

« Allez voir les sons abstraits de l'air ! »

« Partez entendre les images de la mer ! »

Mais pour aller où ?

Les ailes tournent

Mais les plumes n'adhèrent pas

Infidélité de la colle obscure de l'âme

Je fuis l'univers statuaire

Les amandes pleurent

Et les arbres se tournent

Vers leurs fruits fatigués

Les statues de bois s'enracinent

La forme évolue

Et le poète dort encore

Recueil de pierres molles

Les couleurs avancent

Le temps court

L'espoir se remplit d'ailes collées

L'image tourne et se reflète

Mes yeux ouverts n'y voient plus rien

Les ailes tournent

Anorexie vivante

Des espoirs défendus

Les chemins se confondent

Au carrefour des ombres

Retour sans absence

Du silence des voix

Les siècles s'entrechoquent

Sur les fils de la vie

La toile, destruction de la toile

Il repense

Souvenirs mêlés de la genèse crachante

Les salives se rendent

Au destin incompris

Il se rappelle

L'origine du noir

Quand le tout s'est construit

Il retire les siècles

De sur son dos

Le destin s'est fendu

Il y est pénétré

Léger, malgré l'ombre grise

Il observe

Le tournoiement des ailes

Et les anges s'éclatent

Sur les parois tendues

Au loin, la nuit est lumière

Il scintille dans ses yeux

Des reflets d'impatience

Vite, amenez-le

Avant que ne se referme

L'inexorable futur

Il court avec les temps

Pour échapper aux siècles

Il n'aime que le présent

Enfin

Principe universel


Carole Fabre


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