J o ë B o u s q u e t
════════════════════════════════════ Pendule
de la métamorphose ═══════════
il n’y a pas de mot
pour dire
le mot qui ne se dit pas
— sinon
il n’existerait pas
il n’y a plus le temps
il n’y a plus le temps
de compter tout le temps
écoulé
depuis la fin des temps
il n’y a pas assez de corps
pour tout l’amour du monde
il n’y a pas assez de monde
pour faire l’amour à tous ces corps
pour faire l’amour à tous ces corps
qui ne croient plus en l’amour
mais il y a assez d’amour
pour donner naissance
à un nouveau monde
avec ou sans les corps
et il y a assez d’amour
pour se créer de nouveaux corps
— seulement a-t-on le temps ?
on croit que c’est l’ombre
en fait c’est le contraire
la lumière est à l’écart du monde
qui n’en est que l’ombre
si le monde est l’ombre
de la lumière à l’écart
ça n’est pas vraiment l’ombre
mais le reflet de l’écart
entre la lumière et le monde
l’écart entre la lumière
et le reflet
est l’ombre de la distance
illusoire
entre nous tous
bien qu’à l’écart
___________
. . . . . |
il n’y a pas assez
de distance
pour faire la différence
entre la lumière
et l’ombre
et l’ombre
des reflets
que nous sommes
que nous sommes
il n’y a pas la distance
nécessaire
pour savoir qui nous sommes
il y a juste assez de distance
pour prendre le temps
qui s’écoule
entre nous
et nous l’offrir
il reste encore un peu de temps
pour savoir se voir
au-delà des différences
et des indifférences
et des indifférences
alors nous verrons
scintiller les reflets
à travers les corps
et nous penserons
à tout cet amour
qui ne s’est pas dit