de temps en temps

I asked a clock: What time is it?   It replied: What time are you?   _______   source : A. L. Crego alcrego.tumblr.com

Des petits paquets de temps plié sont envoyés par SMS. Ce sont des impulsions électroniques qui permettent d’ouvrir le champ du temps, de le déplier, le déployer, de passer à une autre temporalité, d’accéder à un temps hors du temps qui est plus que le temps. C’est du temps concentré, ramassé sur lui-même, du temps en puissance, qui s’active au moment où l’on reçoit le SMS. Le temps s’ouvre alors, la personne qui l’a reçu disparaît de son monde habituel. Subsiste encore d’elle pendant quelques jours, parfois semaines, rarement des mois, une présence rémanente, telle une empreinte laissée mais qui s’estompe au fur et à mesure que ceux qui l’ont connue l’oublient. La personne est partie ailleurs, dans une autre dimension, ou perspective, temporelle, aux possibilités différentes, multiples, voire infinies, nous y reviendrons, et cette part qui reste d’elle durant un temps déjà révolu continue de fonctionner tant que ceux qu’elle côtoyait l’alimentent par leurs stimuli habituels.: relations familiales, amicales, professionnelles, de voisinage, etc. Mais inéluctablement l’échange s’atténue faute d’être habité par la personne et ceux qu’elle fréquentait se détournent dans l’indifférence. Ainsi la fréquence résiduelle émise par la personne disparue finit-elle par se disperser.

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Combien de fantômes parfois croisés au hasard d’une ruelle, ravivés par le souvenir ou l’émotion, souvent les deux, qui s’intensifient durant quelques secondes avant de se dissoudre.? Il arrive même que l’on entende leur rire, leur voix et, plus rarement, que l’on sente une étreinte, une caresse, un baiser. C’est qu’ils ne peuvent pas trop s’impliquer de ce côté-ci maintenant qu’ils résident hors du temps. Ce leur serait fatal, ils se sentiraient comme aspirés en arrière, retenus par notre temps gelé, prisonniers, et ils ne le supporteraient pas, physiquement ils ne pourraient pas le supporter maintenant qu’ils connaissent la véritable nature, libérée, aérienne, pluridimensionnelle, du temps réel. D’ailleurs on se demande qui reste encore ici puisque depuis que les premiers sont partis c’est tout un monde qui s’efface peu à peu. Non que tout le monde ait connu l’expérience mais ceux qui restent semblent contaminés et de fait interfèrent de moins en moins avec le monde qui les entoure, qu’ils composent, et qui par conséquent se décompose...